L’adultère, ce doux péché, cette tentation délicieusement interdite, exerce sur certains une attraction fascinante. Derrière la façade lisse des maris et pères de famille modèles se cachent parfois des âmes torturées en quête d’un idéal chimérique.
Prisonniers du conformisme social, étouffés par le poids des habitudes, ils aspirent confusément à une forme d’absolu. Qu’ils le cherchent dans la quête du plaisir défendu, l’appel de la liberté, ou la reconquête de leur jeunesse, ces hommes mûrs égarés sur les chemins de la transgression espèrent y trouver une réponse à leurs tourments existentiels.
Mais le fruit alléchant de l’interdit a souvent un goût amer. Car une fois l’ivresse retombée, c’est avec la gueule de bois que s’impose la réalité. Le poids du secret, la peur du temps qui passe, les lendemains difficiles… autant d’épreuves qui attendent celui qui a croqué à pleines dents dans le fruit défendu.
Peut-on alors renouer avec soi-même et retrouver la sérénité perdue ? S’agit-il seulement d’accepter ses paradoxes et d’apprendre l’art subtil de conjuguer passions et sagesse ? Plongeons au cœur de la psychologie des hommes mariés infidèles et des tourments de ces hommes en quête d’un absolu insaisissable…
La tentation de l’interdit
L’appel irrésistible de la pomme défendue. Voilà ce qui pousse certains hommes mariés dans les bras de maîtresses occasionnelles. La rencontre adultère, ce fruit alléchant quoique prohibé, exerce sur eux une attraction magnétique à laquelle il est difficile de résister.
Dès que l’alliance est retirée et la bague rangeée au fond d’une poche, c’est une nouvelle identité qui s’empare de l’homme infidèle. Il n’est plus l’époux rangé rentrant du travail pour retrouver la douce tranquillité du foyer, mais un aventurier en quête de sensations fortes et d’exploits amoureux.
Affranchi momentanément du carcan matrimonial, il goûte avec délice chaque instant de cette liberté volée. Son allure conquérante et son habileté à brouiller les pistes trahissent l’excitation de jouer avec le feu. Séducteur impénitent, il savoure avec gourmandise cette double vie où la dissimulation même a un goût de nectar.
Car c’est bien le secret et l’interdit qui émoustillent et enivrent ces hommes assoiffés de transgression. Braver l’autorité de l’alliance marital, tromper la vigilance de l’épouse, mener une double vie à son insu… autant de petites transgressions grisantes pour celui qui s’y adonne.
Jouir de plaisirs défendus devient une drogue enivrante. Et notre Don Juan du dimanche, tel un toxicomane, augmente chaque fois la dose pour retrouver ce shot d’adrénaline.
La quête de sens
Mais derrière le simple appât du fruit défendu se cache souvent un désarroi existentiel plus profond. Beaucoup de ces maris volages cherchent avant tout à donner un sens à leur existence.
Las d’une vie de famille trop routinière à leur goût, ils se lancent à corps perdu dans une quête effrénée de sensations fortes. Au fil des ans, la flamme de la passion conjugale s’est atténuée pour n’être plus qu’un lumignon vacillant.
Le désir s’est émoussé, rongé par l’usure du quotidien et la fatigue d’une intimité sans surprise. Une vague nostalgie de leur insouciante jeunesse s’empare alors de certains quadragénaires. Ils regrettent cette époque bénie où les conquêtes amoureuses s’enchaînaient avec légèreté.
Désormais père de famille rangé, l’homme marié reste hanté par le souvenir de ces années folles. Au fond de lui sommeille toujours ce même désir de séduction, soigneusement enfoui sous les couches de respectabilité. La cinquantaine venue, ce désir refoulé se rappelle à lui et l’adultère devient l’exutoire idéal.
Il troque son costume cravate pour une panoplie de jeune premier et part en quête de sensations oubliées. Plus que la recherche du plaisir physique, c’est tout un pan de sa jeunesse qu’il espère ainsi retrouver à travers ces aventures. Une madeleine de Proust pour renouer avec l’insouciance perdue.
La recherche de soi
Pour d’autres, l’infidélité recèle une quête plus spirituelle. Las d’être enfermés dans les cases rigides du mari modèle, du père de famille responsable, du pourvoyeur besogneux, ils aspirent confusément à autre chose.
Être soi, et non plus seulement un rôle. Retrouver sa part d’ombre et d’imprévu étouffée sous les obligations. Renouer avec ses aspirations profondes, ses rêves de jeunesse mis de côté. Derrière le conformisme de façade couve une soif d’évasion.
Le temps d’une aventure adultère, l’amant volage goûte l’enchantement de n’être que soi-même. Délesté du poids des convenances, il redevient un instant ce jeune homme insouciant, prêt à vivre l’instant présent sans entraves.
Dans le regard de sa maîtresse, il ne lit pas la tendre résignation de l’épouse, mais le désir brûlant de la conquête. Elle le voit comme il aimerait être, non comme il est devenu. Près d’elle, il laisse libre cours à sa part d’irrationnel et d’imprévu sans crainte du jugement.
Cette parenthèse enchantée lui offre une bouffée d’oxygène, un espace de liberté retrouvée. Cependant, le retour à la réalité sera d’autant plus difficile…
La vie par procuration
Certains maris volages, quant à eux, vivent par procuration à travers leurs maîtresses des expériences qu’ils n’ont pas su ou pas pu vivre durant leur propre jeunesse.
Timides et maladroits avec la gent féminine durant leurs vertes années, ils n’ont connu ni les joies de l’insouciance amoureuse, ni les délices des conquêtes faciles. Leurs premières expériences sentimentales furent peu concluantes, et c’est davantage par résignation que par passion qu’ils se sont finalement engagés dans les liens du mariage.
Une fois les turbulences de la trentaine passées, ils songent avec regret à tout ce qu’ils ont manqué. Célibataires, ils n’ont pas su profiter pleinement de leur liberté. Jeunes mariés, ils n’ont goûté que modérément aux plaisirs de la chair.
Alors, le démon de la curiosité les pousse sur les chemins de l’infidélité. À travers leurs maîtresses d’un jour, ces maris ternes vivent toutes les expériences qu’ils n’ont pas eues. Amants maladroits, ils apprennent les subtilités de la séduction. Timides effacés, ils s’initient aux jeux libertins.
La peur de vieillir
Enfin, dernier motif inconscient de ces égarements passagers : conjurer la hantise de la vieillesse qui approche inexorablement. Chez certains quinquagénaires, l’infidélité est un baroud d’honneur, une ultime bravade pour nier le temps qui passe.
Ils s’accrochent désespérément aux derniers feux de leur virilité, entretenue auprès d’amantes jeunes et belles. Ce n’est plus tant le plaisir physique qui les motive que le besoin viscéral de se prouver qu’ils restent désirables, qu’ils « ont encore de beaux jours devant eux ».
Vieux beaux ténébreux au charme désuet, ils arborent les atours de la séduction avec l’assurance de celui qui a tout connu. Blasés des élans innocents de leur femme, ils recherchent chez leur maîtresse la fascination du novice pour leur mondely experience. Ils aiment à jouer les initiateurs, transmettant leur savoir à de jeunes oies blanches.
Pour eux, l’acte physique importe moins que les préliminaires de la conquête, les petits rituels de la séduction. L’essentiel est de voir le désir dans les yeux de l’autre, de susciter encore l’admiration. C’est le baume qui adoucit la piqûre du temps.
Mais une fois le dernier rapport achevé, c’est toujours la sinistre réalité qui les rattrape…
Voici la suite du récit dans le même style littéraire:
Les lendemains difficiles
Hélas, tout ne sont que mirages éphémères. Et lorsque s’est dissipée la douce ivresse de l’interdit, c’est la dure réalité qui reprend ses droits.
Le matin après l’égarement sensuel, lorsque de nouveau l’alliance est passée au doigt, quel contraste avec les enchantements de la veille! Plus de regards aguicheurs ni de mots murmurés, mais les tracas domestiques et les visages familiers.
Le quotidien conjugal paraît alors bien terne à notre amant repentant. La tendresse de l’épouse si sûre, si prévisible, lui semble désormais insipide. Et dire que c’est là le lot qu’il s’est choisi pour la vie!
Le mari volage déchante vite une fois l’ivresse retombée. Son aventure qui lui semblait hier pleine de promesses lui apparaît soudain bien creuse et vaine. Comment a-t-il pu se laisser aller à de telles fantaisies, lui, l’homme rangé?
Il prend conscience avec effroi du gouffre qu’il a creusé entre sa vie ordinaire et ses aspirations refoulées. Comment concilier ses rêves de liberté avec les devoirs qu’il s’est lui-même imposés? Comment renouer avec la spontanéité et la fougue de la passion après de telles expériences ?
Le poids du secret
Autre tourment qui vient assaillir notre Don Juan impénitent: le fardeau du secret. Car plus encore que l’acte lui-même, c’est le poids de la dissimulation qui alourdit sa conscience.
Ne plus oser croiser le regard de sa femme de peur qu’elle n’y lise la culpabilité. Lui mentir effrontément en imaginant son désarroi si elle savait. Lui faire chaque jour le récit maquillé de sa journée, en omettant soigneusement certains épisodes…
Cette obligation au mensonge permanent est éprouvante pour une nature foncièrement honnête. Elle instaure entre les époux comme une barrière invisible. Chaque mot anodin prononcé recèle désormais une part d’ombre, réveillant le souvenir du pacte rompu.
Certains finissent par ne plus supporter ce dédoublement de personnalité. Rongés par le remords, ils confessent alors tout à leur femme dans l’espoir de se libérer de ce fardeau. Mais le prix à payer pour la vérité est souvent le bris de la confiance, parfois celui du couple tout entier…
La quête impossible
En fin de compte, que recherchaient-ils donc tous à travers leurs égarements? Quel idéal secret les a tant égarés, au point de risquer le naufrage de leur foyer?
C’était avant tout une quête d’absolu. Dans l’exaltation de la passion adultère, ils ont entraperçu une forme d’absolu qui leur a semblé un instant à portée de main.
Absolu du plaisir physique et de la fusion charnelle. Absolu de la liberté, loin des chaînes du devoir. Absolu de l’émotion amoureuse, quand le désir emporte tout sur son passage.
Ils aspiraient confusément à réconcilier les contraires qui les déchirent: la passion et la tendresse, l’engagement et la liberté, la stabilité et l’aventure…
Hélas, en voulant tout concilier, c’est sur le chemin du déchirement qu’ils se sont engagés. Car cet absolu entrevu n’était qu’une chimère. Et ils se retrouvent face au vide, aspirés dans un gouffre qu’eux-mêmes ont creusé.
L’acceptation de soi
Comment alors recoller les morceaux de son âme éparpillée? Comment renouer avec soi-même après de telles déchirures?
Il s’agit d’abord d’accepter ses paradoxes intimes, d’assumer pleinement ses ombres et ses lumières. De réconcilier en soi la part d’idéal et la part de désir, la tendresse rassurante et l’élan passionnel.
Celui qui sait nourrir l’étincelle ardente au sein du foyer conjugal n’a pas besoin de courir l’aventure ailleurs. Celui qui trouve l’épanouissement dans les joies simples de chaque jour ne risque pas de sombrer dans la frénésie des plaisirs coupables.
Il faut savoir écouter la voix de ses aspirations profondes, même si elles dérangent. Leur donner une place, sans pour autant tout sacrifier à leur appel. Accueillir ses émotions, même troubles, sans s’y perdre.
C’est en faisant la paix en lui-même que l’homme tourmenté retrouve le chemin de la sagesse et de la sérénité.
L’art d’aimer
En définitive, la clef se trouve tout entière dans l’art délicat de l’amour. Aimer pleinement sa femme, jour après jour, en restant attentif à ses besoins et à ses rêves. Entretenir la flamme par de petites attentions au quotidien.
Rester curieux de l’autre, de ses évolutions, de ses aspirations nouvelles. Renouveler son regard pour découvrir à nouveau la belle inconnue sous la robe de l’épouse.
Mais aimer aussi ses propres désirs, même dérangeants. Les exprimer, en parler, les satisfaire à deux dans le respect mutuel. Oser la spontanéité, cultiver le plaisir, préserver des espaces d’intimité et de complicité.
Alors, nul besoin d’aventures illicites. Car l’absolu tant convoité, c’est dans la quiétude de l’amour partagé qu’il se laisse entrevoir.
Pour en finir avec la psychologie d’un homme infidèle marié
Ainsi s’achève le récit de la psychologie de ces hommes mariés infidèles, de ces maris en quête de sens qui se sont égarés sur les chemins tortueux de la tentation et du désir refoulé.
Leur soif de transgression et de plaisirs défendus n’était au fond que l’expression d’un profond mal-être existentiel. Prisonniers des carcans de la respectabilité, ils ont voulu goûter par procuration aux fruits alléchants d’une liberté idéalisée.
Mais ce mirage du bonheur parfait s’est vite dissipé, ne laissant que le goût amer de la désillusion. Car on ne trouve pas l’absolu dans la fuite en avant ou la recherche effrénée de sensations. Il réside plutôt dans l’équilibre subtil entre passions et sagesse, dans l’art délicat de savourer les plaisirs simples de l’existence.
S’accepter soi-même avec ses contradictions, accueillir pleinement ses désirs tout en gardant le cap, voilà ce qui mène à une forme d’absolu à portée de main : la sérénité de celui qui vit en paix avec lui-même. Alors seulement on peut goûter en plénitude aux délices de l’amour partagé.